Dans son billet à propos de la finale de La Voix, le blogueur Éric Parazelli se questionne sur l’intérêt que sauront conserver les quatre finalistes après l’ampleur qu’a pris la téléréalité.
Il s’interroge entre autres sur l’essoufflement potentiel de l’engouement pour ces candidats une fois l’émission hors des ondes, et donne en exemple le choix de dernière minute de La Presse de remplacer un élément de manchette illustrant la gagnante, Valérie Carpentier, par un autre à propos de la présidentielle vénézuelienne. Voici ce qu’avait M. Parazelli à dire sur le sujet (vous pouvez voir l’image en question sur son blogue):
Bien sûr, je ne souhaite pas des lendemains qui déchantent aux finalistes de La Voix. Mais après avoir gonflé à ce point la balloune, ne serait-ce pas normal qu’elle finisse par se dessouffler? Même La Presse, qui avait pourtant offert à Valérie sa Une dans sa première édition du jour, a changé d’idée en cours de route pour la «bumper» avec les résultats de l’élection au Vénézuela. Son heure de gloire n’aura duré que quelques heures. On peut douter grandement que Le Journal de Montréal ait pu agir de la même façon…
Outre le désintérêt tout aussi instantané que l’intérêt qu’aurait pu susciter La Voix, bien des raisons peuvent expliquer ce choix éditorial de dernière minute.
Intérêt public vs intérêt du public
Il y a une différence fondamentale entre ce qui intéresse les gens et ce qui est le plus important d’un point de vue sociétal. Nous sommes ainsi faits que généralement, nous préférons des nouvelles plus divertissantes ou en lien avec nos intérêts personnels à ce qui est déterminant pour l’avancement d’une société. Bon, pour certains, l’un est l’autre, mais ce n’est pas toujours le cas, convenons-en.
Dans le cas qui nous intéresse, les pupitreurs de La Presse ont donc eu à choisir entre une nouvelle d’intérêt populaire, soit l’annonce du gagnant (de la gagnante, devrais-je dire) d’une télé-réalité de style variétés, ou une nouvelle d’intérêt politique, soit l’élection d’un nouveau président dans un pays en crise et dont l’issue influencera à coup sûr les relations diplomatiques internationales.
La ligne éditoriale
C’est bien connu, chaque média ou groupe de presse a une ligne éditoriale qui lui est propre. Celle-ci représente l’idéologie du média, les valeurs principales. Si les journalistes n’y sont techniquement pas soumis dans la rédaction de leurs articles, cela peut influencer la manière dont l’information peut être traitée, hiérarchisée ou présentée. Ainsi, un média pourra juger qu’une nouvelle est plus importante qu’un autre alors que son compétiteur pensera le contraire.
On peut donc croire que l’équipe du pupitre du quotidien de Gesca a jugé plus importante et digne de mention la nouvelle à propos de la présidentielle vénézuélienne.
La concurrence
Celle-là, elle est simple. La Voix est une émission réalisée par les Productions J, appartenant à la conjointe du grand patron de la chaîne TVA, qui la diffuse. De plus, ce même patron possède plusieurs magazines et publications, dont le Journal de Montréal, compétiteur direct de La Presse. Ajoutons à tout cela que ce réseau tentaculaire mise beaucoup sur la convergence et l’autopromotion pour mousser ses produits multiplateformes.
En plus de juger que l’élection du président du Venezuela était une nouvelle plus importante, La Presse a choisi de ne pas vanter la concurrence en première page.
En somme, bien que ces explications soient des hypothèses expliquant le remplacement de l’élément de une, ils permettent de mieux comprendre un raisonnement qui, souvent bien inconsciemment, s’opère dans l’esprit des journalistes pupitreurs. L’exemple permet de résumer les différentes modalités qui justifient comment la répartition des contenus sur une manchette, qui sert généralement à répondre en 2 secondes à la question suivante: que s’est-il passé hier étant le plus digne de mention?
Chacun ses goûts!
Quel belle écriture, quel beau sylve, quelle belle articulation des idées!
Robert, le frère de Réjean
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