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Échos des Assises: faire vivre une info locale au national

Les régions intéressent-elles encore Paris? Telle était la question à laquelle ont tenté de répondre des panélistes dans le cadre des 11e Assises internationales du journalisme de Tours, en France. *

À entendre parler ces personnalités de l’écosphère journalistique française, il suffisait de troquer le mot « Paris » pour « Montréal » et le portrait était un copié-collé de ce qui se déroule actuellement au Québec.

Françoise David, cheffe du service des régions de France 2 (à ne pas confondre avec l’ancienne députée de Québec solidaire!) l’admet d’emblée: un sujet d’actualité n’est pas traité avec le même intérêt « quand on sait qu’il est destiné au bulletin national; nos centres d’intérêt sont différents à Paris que dans les régions. » Un constat que confirme Frédéric Vézard, directeur adjoint des rédactions du Parisien: ce sont l’intérêt national de l’information et son caractère exemplaire ou inusité qui déterminent si une dépêche sera reprise ou non.

Il existe cependant un réel échange entre les deux niveaux d’information; le national peut aisément demander le traitement d’une nouvelle aux productions régionales, par souci d’économie, mais celles-ci peuvent aussi proposer leurs dépêches les plus susceptibles d’intéresser toute la France. La « résonance » plus large du sujet ou le fait qu’on puisse tirer une leçon de celui-ci, indépendamment de sa situation géographique, est déterminante, relève Mme David.

Selon Jacques Trentesaux, président et co-fondateur de Médiacités, le fait que ce soit les patrons de presse parisiens, pour la plupart, qui choisissent ce qui est retenu pour le national ne dessert pas la nouvelle adéquatement, notamment parce que ceux qui prennent la décision connaissent mal les régions. « Et donc, on ne choisit pas selon les bons critères. La nouvelle n’est pas jugée à sa juste valeur », dit-il. Qui plus est, en imposant ce qui est d’actualité et ce qui est le plus important, ces joueurs dominants obligent les autres médias à suivre, pour éviter d’avoir manqué la nouvelle.  Le système actuel n’aurait  comme résultat que d’affaiblir les salles de rédaction régionales avec pour conséquence de rendre la presse nationale « plus parisienne » que jamais. « En position de faiblesse, il est plus difficile de s’imposer », déplore-t-il.

Il existe une forme de snobisme à l’égard des journalistes qui travaillent dans les régions, ajoute M. Trentesaux: ils sont perçus ou bien comme des journalistes en apprentissage qui monteront à l’échelon national lorsqu’ils auront atteint un certain niveau de potentiel, ou bien ils sont des journalistes de seconde classe. Quand on sait que les médias français embauchent aussi des correspondants locaux, c’est-à-dire des citoyens n’ayant aucune formation en journalisme, dont le rôle est de préparer des dépêches sur des sujets jugés plus triviaux… À cela, M. Vézard ajoute que les journalistes eux-mêmes contribuent à ce système stéréotypé en intégrant inconsciemment qu’il fallait toujours viser les grandes boîtes. Think big, ‘sti!

De l’autre côté, soutient le journaliste régional chez Les Échos Stéphane Frachet, les reporters en région sont perçus par plusieurs acteurs locaux comme un faire-valoir, une voie d’accès facile à la visibilité des nouvelles nationales.

Il a été reconnu que les moyens, et le temps, manquent aux journalistes en région pour réaliser des enquêtes plus poussées.

En dépit de ces constats, nos cousins français ont peut-être trouvé une manière d’éviter l’extinction des voix locales. Comme les médias nationaux et régionaux travaillent en réseau, les reportages sur les régions ont davantage de chances d’être reprises dans les grands bulletins et journaux.

Les intervenants ont reconnu que ce réseau est essentiel pour la survie de ces médias et des emplois de journalistes. Le journaliste basé en région joue un rôle primordial et, comme c’est le cas chez nous, a une connaissance terrain de loin supérieure à celle d’un journaliste national, ce qui apporte toujours une profondeur supplémentaire, souligne M. Trentesaux. Mieux, ce journaliste sait immédiatement quels intervenants sont les mieux placés pour réagir, souligne Mme David. Ainsi, plutôt que de parachuter un journaliste du national dans une province ou une commune pour traiter du sujet, on reconnaît l’expertise de celui qui est déjà sur place.

Et si on s’en inspirait un peu?

*Ma participation aux Assises est possible grâce à une aide financière de Les Offices jeunesse internationaux du Québec.

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