Ah, les élections! Je ne connais pas un journaliste généraliste qui ne soit pas le moindrement emballé à l’idée de couvrir les débats sociaux, les différents points de vue et la ferveur politique qu’une campagne électorale suscite.
Durant une campagne, le travail des journalistes prend tout son sens, informant le public des divergences politiques, des idées apportées, tentant de couvrir le mieux possible, tous les partis en fonction de leur importance sur l’échiquier politique. Il s’agit-là d’une des périodes où les médias sont des plus utiles, en alimentant le débat public et en servant de plateforme aux candidats et aux partis.
D’ailleurs, devant la multitude d’annonces et d’événements partisans qui ont lieu chaque jour, les candidats doivent être originaux, mais surtout pertinents, pour se démarquer et obtenir une bonne couverture médiatique, particulièrement dans les médias nationaux. Souvent, ils bénéficient des services de personnes attitrées aux communications de leur campagne: envoi de communiqués, d’invitations, etc. qui gèrent les relations avec les journalistes à leur place.
Or, j’ai constaté que depuis le début de la campagne, certaines communications arrivent beaucoup trop tard pour être utiles, c’est-à-dire le lendemain, voire plusieurs jours après la tenue de l’événement! Résultat; le candidat n’arrive pas à faire passer efficacement son message, ou perd tout contrôle sur la couverture médiatique de sa campagne. Les efforts investis ont donc un effet quasi nul.
Car en ce temps de campagne, la couverture journalistique se mesure en heures, ou à une journée tout au plus. En tout temps cependant, elle opère selon une règle toute simple, mais immuable: la pertinence d’une nouvelle est inversement proportionnelle du temps qui passe depuis qu’on la connaît.
Pour un média télévisé ou radiophonique, qui comprennent plusieurs bulletins de nouvelles par jour, la nouvelle est parfois si momentanée qu’elle est remplacée en cours de journée. Pour un quotidien, dès qu’une ou deux journées passent, la nouvelle n’est plus fraîche s’il n’y a pas de nouveaux développements. Les hebdomadaires ont une plus grande marge de manoeuvre, mais déjà, le virage pris sur le Web fait en sorte que ces publications adoptent de plus en plus le rythme d’un quotidien.
Un exemple facile à comprendre: une candidate prend part à un événement partisan un mardi, rencontre à laquelle un journaliste ne peut assister en raison d’un conflit d’horaire. Il promet toutefois d’en faire un bref compte-rendu si la relationniste de ladite candidate lui fait parvenir un communiqué, ce qu’elle fera… le dimanche suivant.
Malheureusement pour la candidate, l’événement dont il est question sera donc passé sous silence dans le média, puisqu’il n’en valait plus la peine d’en parler cinq jours plus tard.
En communication publique, un communiqué résumant un événement doit être envoyé le plus rapidement possible après que celui-ci ait eu lieu. Souvent, on le remet même aux médias lorsque les journalistes arrivent pour que ceux-ci puissent l’utiliser dans la couverture en direct de leur événement.
À l’occasion, en communication toujours, il peut arriver qu’on avance ou qu’on retarde une annonce d’une ou de quelques journées, quand on sait qu’un événement ou une nouvelle d’envergure risque d’accaparer l’attention des médias. Il en va de même quand on veut communiquer une information peu flatteuse ou négative: on le fait à un moment où celle-ci risque moins de se retrouver en manchette.
Cela dit, en campagne électorale, cela est en pratique presque impossible. Chaque annonce est encore plus éphémère qu’à l’habitude, car elle peut être difficilement reportée vu son caractère instantané. On ne peut jouer avec la temporalité d’une déclaration ou d’un événement de la même manière qu’on pourrait le faire en temps de couverture régulière, car tous les candidats, tous les partis et toutes les équipes se disputent chaudement l’attention médiatique dans l’espoir d’obtenir quelques votes supplémentaires.
Rappelons ici que les médias ne font pas campagne à la place des candidats. Heureusement, il reste encore quelques jours à ceux-ci pour corriger le tir.