Le chroniqueur politique du Soleil, Gilbert Lavoie, signe ce matin un texte portant sur la course à la direction du Parti québécois. Il souligne le fait que les médias semblent accorder beaucoup plus d’attention à Pierre Karl Péladeau qu’à ses rivaux, un constat que dressent bien malgré eux ces derniers. Lavoie y va d’emblée d’un exemple:
Cette perception a été accentuée par l’attention exceptionnelle accordée au lancement de la campagne de Péladeau, le 30 novembre à Saint-Jérôme : une heure en direct sur les ondes de LCN. […] Propriété de Quebecor, LCN a été le seul réseau à diffuser l’événement en direct.
Lavoie rapporte l’impression des autres candidats que les journalistes donnent Péladeau gagnant d’avance en lui offrant autant de couverture médiatique.
Les autres candidats, qui constatent l’avantage médiatique de leur adversaire, sont médusés. « Que les médias aient couvert son discours de lancement, c’est une chose, mais qu’ils aient été présents au dépôt de son bulletin de candidature, c’est incroyable » a déclaré l’un d’entre eux.
Un autre s’inquiète de voir la notoriété l’emporter sur les questions de fond. « Pierre Karl a des réponses à donner, mais si les médias le couronnent à l’avance… C’est comme le chien qui court après sa queue. Parce que les médias estiment que c’est réglé, ils lui accordent plus de couverture. Et en lui accordant plus de couverture, ils accréditent l’idée
que c’est réglé ».
On propose ensuite certaines pistes de solution:
Tous les candidats estiment que les entreprises de presse doivent s’interroger sur cette situation. Ils estiment également que l’exécutif et la permanence du PQ doivent être les gardiens d’une certaine équité entre les candidats. Et que dans les circonstances, des représentations auprès des médias d’information seraient peut-être appropriées.
Mettons de côté les recommandations faites au parti. Oui, les médias devraient effectivement s’interroger sur la situation. Mais nous connaissons déjà une partie de la réponse…
Après la dernière campagne électorale, j’avais réalisé un post mortem sur ce blogue, et un autre pour le magazine Le Trente, dans lequel j’interrogeais la direction de l’information de certains médias nationaux sur les choix de couverture des différents partis. Ce qu’il en est ressorti, dans certains cas, c’est que les médias n’accordent pas une attention égale aux partis, mais donnent davantage de visibilité à ceux qui ont de réelles chances de s’approprier le pouvoir. Bref, on privilégie une couverture qui se colle aux intentions de vote ou plutôt, aux probabilités d’être élu.
Il y a fort à parier que c’est le même phénomène qui se produit actuellement autour de M. Péladeau, et ce n’est pas une surprise pour personne. Et le traitement journalistique de la controverse entourant ses actifs chez Québecor, qui alimente autant les débats politiques que les médias depuis l’annonce de sa candidature au poste de député de Saint-Jérôme, continue d’amplifier la situation.
En lui offrant autant d’espace médiatique, les journalistes contribuent effectivement à rendre sa victoire encore plus accessible, malgré eux. Mais en ne tenant pas compte de l’envergure de sa candidature par rapport aux autres, influencent-ils aussi le cours de la campagne?
Sachant cela, les médias devraient-ils modérer leurs ardeurs pour éviter de favoriser un candidat? Difficile à dire. Il va de soi qu’un candidat plus intéressant, plus connu ou plus « sexy », médiatiquement parlant, suscitera davantage l’intérêt des journalistes, comme l’intérêt du grand public.
La réponse se trouve peut-être ailleurs. Peut-on parler autant de M. Péladeau, mais tenter de s’intéresser davantage aux propositions des autres candidats? À condition que ceux-ci fassent des propositions, bien sûr… Il serait vain d’offrir de la visibilité à un candidat qui ne présente peu d’idées ou qui ne fait pas d’effort.