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COVID-19: effet domino dans les médias

C’est un paradoxe pas si difficile à expliquer.

Alors que le monde entier est paralysé en raison de la pandémie de coronavirus (COVID-19), tous les médias sont au pied d’alerte et rapportent le moindre fait nouveau en temps réel.

Ça a du bon. Ça remet les priorités à la bonne place. L’intérêt public est ce qui prime, la concurrence est mise de côté. Et les médias réaffirment leur importance en temps de crise, en tant que plateformes fiables d’information. Les équipes journalistiques, telles des armées, travaillent d’arrache-pied (beaucoup à partir de la maison) pour livrer les derniers développements, mais aussi pour démentir la quantité effroyable de fausses informations qui circulent sur Interner.

Et pourtant, alors qu’ils sont plus nécessaires que jamais, il s’en est trouvé pour couper des postes de journalistes. Eh oui, six journalistes ont été remerciés du journal Le Citoyen, en Abitbi, lundi après-midi. Puis, mardi, c’est en Gaspésie que le couperet a tombé, avec la mise à pied temporaire de trois journalistes et tout autant de représentants publicitaires pour les journaux L’Avantage gaspésien, L’Avant-poste et Chaleurs nouvelles.

Ailleurs, des journalistes ont vu leurs heures de travail réduites pour éviter d’en arriver à des coupures de poste. On resserre les cordons de la bourse. C’est sans compter tous les pigistes, journaliste et photographes, dont le téléphone a arrêté de sonner et la boîte de courriels a arrêté de se remplir, parce qu’on n’a plus les sous pour leur donner de l’ouvrage.

Mercredi, c’est le magazine culturel Voir qui a sabré dans sa salle, en remerciant pour six mois sept de ses journalistes , a rapporté le journaliste Étienne Fortin-Gauthier. Le propriétaire du média, Alexandre Taillefer, a confirmé la nouvelle et a indiqué que la mesure est directement liée au coronavirus, notamment parce que les annonceurs principaux de la publication sont des restaurants et des organisations du milieu culturel. Celui-ci a d’ailleurs mentionné que 70% des publicités nationales dans les médias imprimés ont été annulées pour les trois prochains mois.

Ce même jour, CBC, le pendant anglais de Radio-Canada, a annoncé qu’il suspendait tous ses bulletins de nouvelles locaux. Des reportages régionaux seront toujours réalisés, mais ils seront présentés dans le cadre d’un bulletin de nouvelles national unique. La Guilde canadienne des médias n’a pas tardé à dénoncer cette mesure.

Journalistiquement, c’est en effet discutable. Ce qui préoccupe les gens à l’heure actuelle, c’est de savoir comment la situation évolue chez eux. Quelles sont les mesures en place pour atténuer la crise? Combien de cas locaux ont été dépistés? Y a-t-il des initiatives à souligner? Qui contacter au besoin? Quels services sont maintenus et lesquels ne le sont plus?

Et puis, dans Le Devoir, vendredi, Philippe Papineau signait un papier faisant état de l’ampleur de cette autre crise provoquée par la crise. Dans certains hebdomadaires, la chute de revenus est de 30%, en une semaine à peine.

Encore une fois, une question de revenus. Quand on parle de survie des médias, c’est toujours une question d’argent.

Paradoxalement, alors que les médias professionnels sont plus consultés que jamais, les annonceurs, eux, se retirent.

D’abord parce que certains ne souhaitent pas être « associés » aux mauvaises nouvelles qui touchent le coronavirus alors que celui-ci n’était pas encore le sujet du jour (et de la semaine).

Ensuite, et surtout pour cette raison, parce que ces annonceurs essuient eux-mêmes des pertes financières importantes en raison de la distanciation sociale exigée par le gouvernement et qui force bon nombre de citoyens à demeurer à la maison.

Plusieurs entreprises, commerces et lieux de rassemblement ont également été contraints de fermer leurs portes pour limiter les groupuscules d’individus, et beaucoup d’employés doivent demeurer chez eux. Ce faisant, l’activité économique a été freinée très rapidement. Et où coupent les entreprises lorsqu’elles doivent se serrer la ceinture? Le budget publicitaire dans les journaux est, règle générale, parmi les premières économies réalisées.

La situation renforce l’argumentaire de ceux qui, comme moi, sont en faveur d’une certaine aide financière de l’État aux médias d’information professionnels, afin que ceux-ci ne soient pas soumis aux aléas de l’économie et qu’ils puissent poursuivre leur mission d’informer en temps de crise.

C’est souvent dans ces moments-là que les médias prouvent leur utilité. Et le premier ministre québécois François Legault l’a reconnu, vendredi, lors de son point de presse quotidien pour traiter des plus récents développements de la crise. « Les médias assurent un service essentiel », a-t-il dit, ajoutant que le gouvernement était à la recherche de solutions pour soutenir les entreprises de presse, plus vulnérables que jamais au moment où elles sont les plus nécessaires.

Québec solidaire n’a pas tardé à proposer au gouvernement du Québec d’investir en publicité dans les médias pour communiquer des messages d’intérêt public tout en soutenant financièrement le journalisme.

Évidemment, chaque fois qu’il est question d’une aide gouvernementale, la question se pose: qui doit-on aider? Qui est journaliste et qui ne l’est pas? Quels médias sont crédibles et lesquels ne le sont pas?

Vendredi après-midi, tout en saluant la déclaration du premier ministre Legault, la Fédération professionnelle des journalistes du Québec a rappelé l’importance des médias professionnels d’information et la gravité de la situation dans laquelle ils se trouvent.

Les commerces locaux ont besoin d’aide, les médias locaux aussi. On espère que lorsque la situation sera rétablie, que la communauté se souviendra du rôle de leurs journaux, radios et stations de télévision, pour ne nommer que ceux-là, en temps de crise.

2 réflexions au sujet de “COVID-19: effet domino dans les médias”

  1. Excellente analyse, mais triste réalité. Je crois que nous n’avons encore rien vu. Mais, nous avons la chance au Québec, d’avoir un État, qui malgré la situation, pose les gestes qu’il faut pour prévenir le maximum de dommages. Demeurons positifs, car il sera important de tirer des leçons pertinentes de ces événements et ce pour l’Avenir de notre nation, voire de l’humanité.

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